Serge Bayala : « Ce n’est pas avec des gaz lacrymogènes qu’on parle de dictature »

Le mouvement Deux heures pour Kamita, une organisation de la société civile n’a pas participé à la marche-meeting réprimée du 16 septembre 2019. Le mardi 17 septembre 2019, au micro de Burkina 24, Serge Bayala, porte-parole dudit mouvement, s’est expliqué. Il a jugé la manifestation inopportune vu le contexte sécuritaire délétère.

Burkina 24 : La marche de l’Unité d’action populaire (UAP) a été réprimée par la police. D’aucuns ont jugé inopportune la marche. Quel est votre avis ?   

Serge Bayala : Vous aurez remarqué que nous n’avons pas participé. En tant que mouvement, nous avons jugé inopportune, la tenue d’une telle activité surtout que dans le contenu, il y avait ceux-là qui ont créé cet état de chaos et on avait plusieurs voix.

On avait non seulement des gens qui avaient des avis, de dire que les sanctions retenues contre les deux généraux (Gilbert Diendéré et Djibrill Bassolé) étaient des sanctions minimales et on avait en même temps les partisans des généraux qui étaient là et qui pensent qu’il faut même les absoudre de toute peine.

Finalement, on n’arrivait pas, en tant que mouvement, à comprendre d’abord le contenu et l’harmonisation des points de vue des revendications qui étaient contenues dans la plateforme, même si certaines sont pertinentes.  Nous avons jugé inopportune cette marche au regard de l’environnement sécuritaire très délétère. Nous pensons que les forces devaient être rassemblées pour lutter contre l’ennemi commun et après, les revendications secondaires viendront.

Le pays est menacé, mis à rude épreuve, mis en péril et les revendications syndicales ne peuvent venir que dans un Etat stabilisé, qui vit. Un Etat qui n’existe pas, il ne peut plus y avoir de revendications syndicales, il ne peut plus y avoir de démarche de demande d’augmentation de salaire.

Notre posture, elle était claire et nous l’assumons. C’est celle de travailler à l’unité nationale autour de la nation qui est attaquée par les ennemis au lieu de nous battre à l’intérieur contre nous-mêmes et nous présenter à l’ennemi comme étant affaibli et lui garantir une victoire certaine.

Burkina 24 : Malgré l’interdiction par les autorités, la marche a eu lieu, elle a été réprimée. Pensez-vous comme certains que le pouvoir de Roch Kaboré est en train de décliner dans la dictature ?

Serge Bayala : Je trouve que c’est exagéré. C’est hyper exagéré. On a vu pire sous le régime répressif de (Blaise) Compaoré, mais je ne pense pas que les syndicats ont été autant sévères vis-à-vis du régime répressif et dictatorial de Blaise Compaoré qu’ils le sont à l’égard du régime actuel qui est surtout une suite logique de cet ancien régime.

Je pense que c’est caricatural. C’est mon opinion personnelle et je pense que là, il y avait un défi de rétablir ou de rechercher à travers cet acte d’affront à l’Etat de droit, une certaine volonté de rétablir par ça, une certaine autorité légale. Je ne mesure pas ça au-delà de cette instrumentalisation qui va très vite aux désignations caricaturales de début de dictature de régime tortionnaire. Non, je pense que c’est même ridicule de caricaturer ça comme ça. Ce n’est pas des actes extraordinaires dans un Etat de droit.

En France, les gilets jaunes se font casser tous les jours, tous les weekends, mais ce n’est pas pour autant que la CGT-F désigne le régime de Macron comme étant dictatorial. Aux Etats-Unis, il n’y a presque pas de jour qui passe sans qu’on ne tue, mais on ne parle pas de régime dictatorial. En plus, ce n’est pas avec des gaz lacrymogènes qu’on parle de dictature.

Burkina 24 : Quel est votre mot à l’endroit des Burkinabè de tout bord ?

Serge Bayala : C’est dire que nous avons des revendications légitimes, mais ce qui doit primer, c’est que toute cette ambiance idéologique, toute cette ambiance de désir ou de vision ne peut être que dans un Etat qui est libre. Donc, travaillons d’abord à garantir aux populations, l’intégrité de son territoire.

Après avoir bouté les terroristes hors de nos frontières, on peut formuler toute sorte de revendications qu’on veut. Pour moi, il y a une contradiction centrale qui est celle de la survie de la nation. Focalisons-nous autour de ça, priorisons ça.

Nous ne sommes plus dans une situation normale. Chacun doit donner une petite parcelle de sa liberté. Chacun doit donner une petite parcelle de ces moyens. Chacun doit donner une petite parcelle de son confort. Chacun doit donner une petite parcelle de son luxe et c’est toutes ces petites parcelles de liberté que nous cédons à la nation qui vont l’amener à exister et à la fin, nous allons formuler toutes les revendications que nous souhaitons.

Source : Burkina 24.com

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